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AI actually

 

Bridget Jones tente de faire bonne figure chaque année quand arrive le 14 février. Quelques notes de My Funny Valentine pour l’ambiance (dans la version de Chet Baker). Brefs instants de grâce, éphémère moment suspendu.

 

Et inéluctable retour au réel.

 

L’atmosphère ambiante n’est pas celle des

 

rom coms mais plutôt celle des duels au soleil ou des combats de MMA. L’époque est à la confrontation, au muscle, à l’exacerbation de la virilité testostéronée. Dans la rue, à coup de couteau. Dans le monde géopolitique, à coup de déclarations et postures martiales, de missiles aussi. Dans l’IA à coup de milliards de dollars. Selon un récent sondage, plus d’un quart des Français ne croient plus en la politique. 45% ne croient plus aux élections. Et un pourcentage non négligeable aspire à un gouvernement autoritaire. Un sondage qui fait frémir. Et interpelle. Comment en est-on arrivé là ?

 

On a cru un moment à la fin de l’Histoire. L’Histoire s’est remise en marche, avec son lot de conflits, de morts kilomètre, en mode uppercut. Les ingénieurs du chaos sont à l’œuvre pour arriver à leur fin : la naissance d’un ordre nouveau orwellien. Les atermoiements à propos de l’éthique de l’IA en sont une pure illustration. Les plus gros bailleurs de fonds clament haut et fort leur indifférence à la question. D’autres prennent le contrepied (de nez) par principe, mais personne n’est dupe. Car dans le monde dystopique, la vérité c’est le mensonge et la paix c’est la guerre. Et la réalité n’est qu’alternative et multiple. Comme dans une vidéo TikTok. Ou comme dans le monde de Steve Bannon. Il suffit d’inonder la zone (« Flood the zone with shit »). Et ça cause, et ça commente. Et ça s’excite. Entre experts en tout de plateaux télé et de réseaux sociaux.

 

Est-il encore un sujet dont il soit possible de parler sans déclencher une bataille rangée ? Jedi contre Siths, Capulet contre Montaigu, Guelfes contre Gibelins, Anciens contre Modernes, Manchester United contre Manchester City… Avec, comme il se doit, la conviction profonde de chaque camp de détenir LA vérité absolue. Dans ce monde volatile, incertain, complexe et ambigu, il nous faut tenter de raison garder et nous concentrer sur les sujets qui font consensus. Car il en reste. Le jean porté par Kendrick Lamar lors de la finale du Super Bowl par exemple, dont les médias spécialisés affirment doctement qu’il fut la star de la soirée. Le jean, pas l’artiste. Profitons de cet instant pour nous en réjouir et esquisser quelques entrechats, avant de chercher à acquérir l’objet (pas si obscur) du désir immédiat. Mais déjà cette quête déclenche en nous les mêmes sueurs froides et inquiétudes existentielles que celles du fan de Beyoncé ou d’Oasis aspiré dans le vortex de la file d’attente des billetteries en ligne. Bridget Jones nous aidera-t-elle à retrouver le chemin de la paix intérieure ?

 

14/02/25