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L’après Breton

Il était le « shérif » de la tech en Europe. Le départ brutal de Thierry Breton de la Commission marque un tournant majeur pour le secteur, essentiellement en matière de régulation.

 

L’ex-commissaire au Marché intérieur s’était en effet positionné très tôt en défenseur acharné d’une vision européenne de la souveraineté numérique. Il a piloté des législations clés comme le Digital Services Act (DSA), le Digital Markets Act (DMA) et, plus récemment, l’IA Act. Son ambition : mettre fin à ce qui était, selon lui, un « Far West numérique », où les entreprises technologiques évoluaient sans véritable contrôle des régulateurs.

 

Le départ de Breton prive la Commission d’une voix forte contre certaines dérives, estiment les observateurs. Cela peut-il signifier un ralentissement des efforts entrepris ? C’est ce que craignent certains, à l’instar de Sonia Cissé, avocate et spécialiste du numérique, qui estime dans La Tribune que « la plus grande réussite de Thierry Breton est d’avoir mis des textes de régulation sur le devant de la scène et en partie corrigé un des drames de l’Europe, qui est que beaucoup de textes sont publiés discrètement, sans que le grand public perçoive leur importance ».

 

Se pose désormais la question d’un affaiblissement des ambitions européennes, notamment face à des acteurs mondiaux comme Elon Musk, avec qui Breton a souvent croisé le fer, y compris sur les réseaux sociaux. « C’est une bonne journée pour la liberté d’expression », a écrit Linda Yaccarino, PDG de X, sur la plateforme en réponse à la démission de Breton.

 

Mais on peut aussi voir dans ce départ l’opportunité d’un renouveau. La succession de Breton est au centre des attentions, et son remplaçant (ou sa remplaçante) jouera un rôle déterminant dans la continuité ou l’inflexion de la politique européenne. Y’aura-t-il un changement d’orientation vers plus de coopération avec la Silicon Valley ? Arno Pons, délégué général du think tank Digital New Deal, estime que « la position allemande défendue par Ursula Von der Leyen, qui est d’assumer nos dépendances envers les américains, a gagné (…) La vision gaullienne du numérique défendue par Breton, selon laquelle l’alliance n’empêche pas l’autonomie, est mise à mal. » Les prochaines nominations seront cruciales pour déterminer les nouveaux rapports de forces et les ajustements nécessaires pour maintenir l’équilibre entre innovation et contrôle au sein de l’UE.

 

18/09/2024