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Taylor Swift : la voix d’une génération ?

Avec sa tournée pharaonique, son film-documentaire qui supplante le dernier Martin Scorsese au box-office, des ventes d’album inégalées, une fortune estimée à 1 milliard de dollars : à 33 ans, la chanteuse américaine bat tous les records. Un succès qui n’a rien d’anecdotique tant ses répercussions sont considérables pour l’économie américaine et le futur de l’industrie musicale.

 

Depuis le lancement de sa tournée mondiale « Eras Tour » en mars dernier, le phénomène Taylor Swift est devenu un moteur important de la croissance américaine. Le président de la Fed John Williams a confirmé l’impact de la chanteuse sur l’économie locale. Grâce à un afflux de visiteurs pour les concerts de Taylor Swift à Philadelphie, le mois de mai 2023 a été le plus important pour les revenus hôteliers de la ville depuis la pandémie. À ce jour, la tournée a d’ores et déjà récolté 700 millions de dollars de revenus grâce aux dates nord-américaines. Le show qui passera par l’Europe, l’Asie, l’Océanie et l’Amérique latine en 2024, devrait rapporter 2,2 milliards de dollars, selon une étude QuestionPro relayée par CNN et ainsi devenir la tournée la plus lucrative de l’histoire.

 

Derrière ces chiffres qui donnent le tournis, se cache une longue bataille menée par Taylor Swift depuis bientôt six ans pour reprendre le contrôle de sa carrière, de son image et de sa liberté.
Dès ses débuts dans la country à l’âge de 16 ans, l’image de la chanteuse a été utilisée par les conservateurs américains, l’opposant systématiquement à Beyoncé. Suivant les conseils de son entourage lui interdisant de s’exprimer sur des sujets qui lui tiennent à cœur, de crainte de cliver son public, elle attendra 2017 et la sortie de son album « Reputation » pour prendre la parole pour défendre les droits des personnes LGBTQI+ et dénoncer la misogynie d’une partie de l’industrie musicale. Longtemps réduite à ses déboires amoureux qui ont fait de ses chansons de véritables tubes, l’interprète de « Shake it off » a opéré un tournant dans sa carrière en 2019 lorsqu’elle décida de s’opposer à son label.

 

Comme de nombreux artistes avant elle, Mrs. Swift a signé au début de sa carrière un contrat la dépossédant de ses droits sur les albums qu’elle a écrit, composé et interprété. En 2019, ses « masters » ont été vendus à Scooter Braun, magnat américain de la musique que la chanteuse a accusé de harcèlement et de manipulation, la faisant ainsi perdre ses droits sur ses six premiers albums. Dans ce « David contre Goliath » inédit, Taylor Swift a choisi de s’exprimer publiquement et d’annoncer en 2020 le réenregistrement de ses premiers albums pour reprendre possession de ses chansons. Une décision qui en a surpris plus d’un tant l’influence des maisons de disques était grande et n’avait jamais été contestée par une artiste féminine de son envergure auparavant. Depuis, chaque sortie des albums réenregistrés par la chanteuse appelés « Taylor’s Version » battent des records. Le 27 octobre dernier, Taylor Swift sortait son cinquième album réenregistré « 1989 Taylor’s version ». Il est devenu rapidement l’album le plus vendu de 2023 aux États-Unis.

 

Parmi ses nombreuses croisades pour réformer l’industrie musicale, on retrouve la juste rémunération des artistes, des musiciens et des compositeurs par les plateformes de streaming, la lutte contre le marché noir des reventes de places de concert et la défense des artistes « prisonniers » de leur contrat.

 

Tout cela fait aujourd’hui de Taylor Swift l’incarnation d’une génération, une icône de l’émancipation féminine qui redistribue les cartes au sein d’une puissante industrie pour les décennies à venir.

 

So it’s gonna be forever?

 

10/11/2023