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Voyage au bout de la haine

Le 7 octobre 2023, un pogrom a eu lieu en Israël pour la première fois depuis la création de l’État juif. Le massacre antisémite perpétré par l’organisation terroriste Hamas a fait 1160 victimes, en majorité des civils, des hommes, des femmes, des vieillards, des enfants, assassinés dans des conditions atroces. Ces actes d’une barbarie inouïe n’ont seulement pas suscité les élans de solidarité auxquels on pouvait s’attendre, mais ont été suivis de la propagation à une vitesse inouïe de la thèse établissant un lien de cause direct entre la politique israélienne dans les territoires palestiniens et l’horreur des crimes perpétrés.

 

Voilà pourquoi, un retour par l’histoire sur les relations entre les communautés juives et arabes de Palestine s’impose. C’est le travail que vient d’effectuer la Fondapol de Dominique Reynié (1) qui met à mal la fameuse vie idyllique des Juifs dans les pays arabes. L’ouvrage montre ainsi que dans le siècle précédant la création de l’État d’Israël, la Palestine a été le théâtre de nombreux pogroms d’une violence comparable à celle du 7 octobre. Entre 1830 et 1948, la répétition de ces massacres visait à contraindre les Juifs de Palestine de quitter cette terre et à dissuader ceux qui avaient été persécutés en Europe de venir s’y réfugier. À titre d’exemple, lors des massacres perpétrés en 1920 à Jérusalem et en 1921 à Jaffa on entend « les Juifs sont nos chiens », « Nous boirons le sang des Juifs » et non « Morts aux sionistes ! ».
De fait, il est impossible de comprendre la barbarie des actes qui se sont déroulés le 7 octobre dernier en Israël, si on ne la situe pas dans cette histoire de la violence antijuive sans limite en Palestine.Quelle communauté doit être protégée d’un conflit qui se déroule à des milliers de kilomètres de ces frontières ? Quelle communauté voit en permanence contester le fait d’être citoyen de son pays ?

 

En deux décennies, la propagande du Hamas dûment relayée par les Frères musulmans a fini par diffuser le poison de l’antisémitisme. Alors que les Français juifs constituent le cours le plus intérieur de notre Histoire (2), ils sont considérés par une fraction de l’opinion comme des Israéliens en visite en France. Cherchez l’erreur, trouvez l’horreur. Faut-il condamner tous ceux qui estiment légitime le soutien accordé à ce qu’ils nomment « la cause palestinienne » ? La réponse est non. Mais, au moins est-il permis de s’étonner que cette empathie ne s’exerce pas envers les Rohingyas musulmans en Birmanie ou envers les 12 millions d’Ouïghours musulmans en Chine qui vivent pourtant, au quotidien, les pires persécutions. Où sont les manifestations ? Où sont les pétitions ?

 

À Columbia, aux États-Unis, la police a été obligée de procéder à l’évacuation de l’université, ce qui n’était pas arrivé depuis 1996. Il s’agissait d’arrêter les délires antisémites proclamant : « vive le Hamas, il faut brûler Tel Aviv » ou encore « (il faut) un 7 octobre tous les jours ». Des étudiants juifs ont été menacés de mort. S’inspirant des mobilisations en soutien de Gaza organisées sur les campus américains, des organisations propalestiniennes ont bloqué Sciences Po Paris. Dans les deux cas, ces pratiques n’annoncent-elles pas des lendemains qui déchantent ?

 

(1) Les pogroms en Palestine avant la création de l’État d’Israël (1830 -1948), Fondation de l’innovation politique.
(2) Lire à ce propos, le magnifique roman de François Heilbronn, Deux été 44 paru chez Stock.

 

26/04/2024