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CAHIER DE TENDANCE #138 | 12 MAI 2023

À l’occasion de la présentation de sa stratégie pour accélérer la réindustrialisation de la France, Emmanuel Macron a appelé l’Union européenne à faire « une pause réglementaire » en matière de normes environnementales. Le but est d’aider les entreprises face à la concurrence des autres pays qui, eux, ne font aucune pause dans la concurrence et sont loin – très loin – d’adopter les critères environnementaux si prisés des pays occidentaux. « On est devant, en terme réglementaire, les Américains, les Chinois ou tout autre puissance au monde », a déclaré le président de la République. Il juge, en effet, que le temps de jouer les bons élèves est peut-être révolu. Les contraintes liées au réchauffement climatique ne sont-elles pas au sein de l’Union beaucoup plus strictes qu’ailleurs ? A ses yeux, il faut désormais de la « stabilité ». Ce dernier mot donne à penser car il suggère que la course effrénée aux directives écologiques est de nature à déstabiliser nos économies avec le risque d’être les mieux-disants en termes de réglementation et les moins-disants en termes de financement.

 

Comme on pouvait s’y attendre ce constat a provoqué une vive polémique relayée par les écologistes et leurs alliés, ceux-ci étant depuis longtemps partisans d’une écologie punitive. Ils ont tous jugé « irresponsable » cette fameuse et fumeuse pause. « On parle d’anéantissement de la biodiversité. On n’ a pas à lever les normes environnementales ! On a au contraire à les augmenter », clament-ils. Certains ont trop vite mis en parallèle la déclaration du chef de l’État et de celle d’un de ses prédécesseurs, Nicolas Sarkozy, qui en 2011 avait déclaré au salon de l’agriculture que l’écologie « ça commence à bien faire ! ». D’autres critiques ont rapproché cette pause de la petite phrase du chef de l’État : « Je ne crois pas que le modèle Amish permette de régler les défis de l’écologie contemporaine ».

 

L’eurodéputé Pascal Canfin, un ancien des Verts, devenu cadre du parti présidentiel a regretté « une phrase malheureuse qui ne traduit pas ce que la France fait ». On notera juste que dans le même temps, Bruno Le Maire sur une chaîne d’info a souligné la nécessité d’accélérer la transition écologique. En fait, Emmanuel Macron s’est contenté de mettre en avant une vérité simple : la législation européenne est la plus ambitieuse au monde et il faut déjà faire en sorte de l’appliquer et de produire chez nous selon ses normes avant de chercher à aller plus loin. Car réindustrialiser la France suppose de produire sur notre sol des biens respectueux de l’environnement plutôt qu’en-dehors de l’Europe où les contraintes sont infiniment moins élevées. Poursuivre la réglementation ne peut que produire l’effet inverse que ce qui est attendu. D’ailleurs, à son tour le ministre de l’Industrie Roland Lescure s’est dépêché de se livrer à une explication de texte en évoquant jeudi dernier sur France info un impératif de visibilité pour les industriels et ce, sur plusieurs années. Il ne reste plus qu’à convaincre les 26 autres États de l’Union.