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Le point sur le partage de la valeur

Le partage de la valeur offre régulièrement une porte de sortie de crise à l’Exécutif. Nicolas Sarkozy y avait eu recours pour apaiser les esprits lors de la crise financière de 2009-2010 afin d’accoucher en 2011 d’un dispositif primes contre dividendes (devenu « prime Sarkozy »).
En 2018, c’est une crise sociale cette fois – la crise des gilets jaunes – qui débouchera sur la création d’une nouvelle prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (« Prime Macron ») exonérée d’IR et de charges sociales, rebaptisée depuis prime de partage de la valeur aux conditions assouplies et augmentées jusqu’au 31 décembre 2023

 

La thématique a refait surface avec la crise énergétique et la forte poussée de l’inflation à l’automne 2022 pour s’imposer aujourd’hui comme l’une des portes de sortie politiques de la crise sociale engendrée par la réforme des retraites.

 

  • Opposition patronale de principe

 

L’idée du « dividende salarié » avait notamment été théorisée par Thibault Lanxade, ex-Vice-président du MEDEF, avant de devenir une promesse de campagne du candidat Macron en 2022.
Face à l’opposition du MEDEF, l’idée avait été écartée de la loi pouvoir d’achat adoptée l’été dernier au profit du précédent dispositif, exclusivement incitatif et limité dans le temps.

 

  • Fin de non-recevoir aux alliés du camp présidentiel à l’AN

 

Si la piste d’une taxe sur les superdividendes, défendue notamment par Jean-Paul Mattéi, Président du groupe MoDem à l’AN, a finalement pu être repoussée de justesse lors du débat budgétaire de l’automne 2022, le Gouvernement a considéré en contrepartie qu’il convenait de ne pas clore politiquement le dossier.

 

  • Un sujet placé sous le signe du dialogue social

 

Dès novembre 2022, Elisabeth Borne et Olivier Dussopt ont engagé une concertation avec les partenaires sociaux placée sous les injonctions contradictoires des organisations patronales, refusant tout dispositif contraignant, et des organisations syndicales plutôt favorables à une augmentation générale des salaires ou leur indexation sur l’inflation.
Le syndicats réclament toujours une grande conférence salariale avant que de revenir s’asseoir à la table des négociations après le mouvement de contestation dans la rue.

 

  • Parallèlement, l’Exécutif a souhaité associé sa majorité parlementaire à la réflexion pour ne pas froisser l’allié Modem

Plusieurs initiatives politiques et parlementaires ont ainsi été mises en place :
– Une mission de cadrage politique, menée par Pascal Canfin député européen Renew et membre du Bureau exécutif du parti présidentiel
– Un Groupe de travail informel des parlementaires de la majorité
– Une Mission d’information de la commission des finances de l’AN sur l’évaluation des outils fiscaux de partage de la valeur en entreprise rapporté par Louis Margueritte (Renaissance), ancien directeur de cabinet adjoint de Bruno Le Maire et d’Eva Sas (Nupes-écologiste).

 

  • Un accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur, qualifié « d’historique » par Bruno le Maire, est conclu mi-février entre les partenaires sociaux

Les organisations patronales ont très vite souhaité préempter le débat pour maîtriser le champ du sujet et ne pas se faire imposer une loi trop rude par les députés. L’argument du cadre permet d’obtenir du Gouvernement de ne pas le dépasser en transposant scrupuleusement l’accord. Fin février, Élisabeth Borne s’était en effet engagée à « respecter le compromis trouvé entre les partenaires sociaux ». Emmanuel Macron s’est récemment engagé devant les organisations patronales à faire de même durant la réunion du 18 avril consacrée aux chantiers sociaux des futurs 100 jours.