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Préférendum

Cela ressemble au détournement du mot « référendum », mais ce mot existe bel et bien. Il désigne la valeur d’une variable ou d’un gradient, comme la température, pour laquelle un organisme vivant peut atteindre son développement optimum. Il s’inscrit dans un intervalle de tolérance biologique, c’est-à-dire une gamme de valeurs à l’intérieur de laquelle un organisme peut se développer. Depuis cette semaine, Olivier Véran et Christophe Béchu semblent vouloir changer sa réalité comme avant lui des élus socialistes.

 

À la Révolution Française, les préférendums s’appelaient « plébiscite communal ». Plébiscite étant un mot-valise du latin, décrets de la Plèbe. Au début du siècle dernier, on demanda aux Français de voter pour leurs préférences sur le système scolaire. Une des questions du QCM portait sur la longueur des vacances scolaires. Le dispositif imaginé était complexe comme le rapporte Dov Alfon sur France Inter. Le Parlement avait décidé que seuls les Français mariés de sexe masculin déjà parents auraient droit de vote. Le 26 juillet 1904, une écrasante majorité des électeurs préférait des vacances plus longues (du 1er juillet au 30 septembre). Mais le ministre de l’Éducation, Joseph Chaumié, jeta les résultats de cette consultation démocratique à la poubelle. Les préférences n’engagent personne, même ceux qui les demandent. Comme les sondages qui n’apparaissent qu’a maxima comme des tendances momentanées.

 

En 2019, l’association Mieux Voter voyait dans le préférendum un outil de pacification et de construction du consensus quand le référendum ne se résumait qu’à voter contre le Gouvernement. Pour Guillaume Drago, professeur émérite de droit public, le préférendum est le moyen de contourner le recours au référendum tout en donnant l’impression d’organiser un débat démocratique.
En communication, détourner un mot de son sens, est un artefact pour donner un nouveau sens commun à un mot peu usité par le grand public. Nous l’avons connu avec « influenceur » qui est passé d’un statut de personnage de l’ombre à celui ayant une visibilité maximale dans les réseaux sociaux. Le détournement orchestré par les agences de communication en 2008/09 était malin. Le sens « faire changer d’avis » a été gardé ainsi que la puissance que sous-entendait celui affublé du titre. L’heureux élu donnait du corps et de la visibilité au nouveau sens du mot. Sans le savoir, il incarnait une catachrèse.

 

Reste une interrogation à cette tentative de détournement. Elle participe à l’ambition constante de tous les gouvernements de vouloir faire société avec la population. Le souci est que vouloir rajouter un énième outil de création de lien renforce l’idée que tous les précédents n’ont rien donné. Détourner veut aussi dire attirer l’attention sur autre chose…