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À hauteur d’âme

En cette Semaine Sainte, il est de bon ton de s’intéresser aux mystères de la Foi. Si dans les besoins fondamentaux de l’être humain figurent par ordre d’importance vitale l’air, l’eau, le sommeil et la nourriture, les histoires, récits et mythes occupent une place qu’il serait dommage de négliger.

L’histoire nous aide à appréhender le monde, le sens de la vie (et son issue fatale), le cosmos, la raison des choses, etc. Quand il y a récit, il y a l’envie d’y croire. Et l’humain a besoin de croyances. Pour se rassurer, pour comprendre. Pour apprivoiser l’inconnu.

 

De divinités en Divinité, en Être Suprême, en révélations — Torah, Bible, Coran, Bhagavad Gita, Tripitaka, etc. — les croyances structurent nos civilisations. Elles s’appuient sur des dogmes, des vérités premières, souvent perçues comme immuables. Au nom de ces croyances, des passions s’enflamment, et parfois des conflits éclatent, dans une forme de lutte pour les esprits… ou les parts de marché. Gott Mit Uns. Et Dieu reconnaîtra les siens.

 

Ah, les dogmes. Tous plus sublimes les uns que les autres. Ne pas passer 3% de PIB de ficit public, par exemple. S’affranchir du dogme est péché. Et le péché, disait Oscar Wilde, est la seule note de couleur qui subsiste dans le monde moderne. Autant dire que la palette est multicolore !

Au-delà du besoin de croire, que chacun peut apprivoiser à sa manière — en fonction desa culture, de sa géographie (avec les risques afférents) et de ses convictions — on observe chez nous un recul progressif des pratiques religieuses traditionnelles. Et plus elles reculent, plus certains discours se rigidifient. On fige des positions, on érige des barrières, on recycle des « c’était mieux avant ». Les Pharisiens de toutes obédiences rejouent la partition des vérités absolues, diabolisant le camp d’en face, à grands renforts d’oukases, fatwas, excommunications, de costumes traditionnels et de couvre-chefs bien choisis.

D’autres, plus contemporains, troquent les figures divines pour des stars du showbiz ou des influenceurs plus ou moins en (Tik)Tok, buvant leurs paroles et mimant leurs moindres faits et gestes. Mais les grandes questions, elles, restent inchangées : Où vais-je ? Où cours-je ? Dans quel état j’erre ? Le Schmilblick, lui, n’a pas bougé d’un poil.

 

Pendant ce temps, la revendication identitaire fait du bruit, parfois portée par ceux-là mêmes qui noncent les identités… des autres. Reste ChatGPT, confesseur numérique, psychanalyste 2.0, oracle de la data, parfois perçu comme une nouvelle divinité — ou pas.

Et si on se contentait de suivre la sagesse simple de Georges Brassens, résumée en deux alexandrins : « Gloire à qui n’ayant pas d’ial sacro-saint, se borne à ne pas trop emmerder ses voisins » ?