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PLF/PLFSS 2025 : Analyse

La France est visée depuis le 24 juillet par une procédure de déficit excessif lancée par la Commission européenne. Six autres pays de la zone euro (l’Italie, la Pologne, la Hongrie, la Belgique, la Slovaquie et Malte) sont également visés.

 

● Les 11 et 25 octobre, les agences Fitch et Moody’s diront s’ils dégradent la note de la France. Standard and Poor’s l’avait déjà dégradée le 31 mai dernier. La dégradation de la notation française a un impact direct sur les taux d’emprunt de la dette sur les marchés et sur le coût annuel de la dette (la charge des intérêts étant inscrite au budget chaque année). Pour mémoire, la France empruntera 300 milliards d’euros sur les marchés financiers en 2025.

 

● Pour 2025, le Gouvernement veut faire voter un budget zéro valeur (gel des dépenses en euros courants hors charges de la dette). Il fallait donc « trouver » plus de 60 milliards d’euros pour éviter une dérive de la trajectoire des comptes publics, dont le rythme tendanciel actuel conduirait – si rien n’est fait – à un déficit public compris entre 6 et 7% du PIB. Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre s’est donné comme objectif de refaire passer le déficit sous la barre des 3% du PIB, mais en 2029 et plus en 2027. Pour 2025, le Gouvernement veut tenir un niveau de déficit limité à 5% du PIB.

 

● Au-delà du fort dynamisme des dépenses publiques, le nouveau Gouvernement semble avoir été surpris par des rentrées fiscales beaucoup moins importantes que prévu, du fait du ralentissement économique.

 

● Le grand sujet politique du budget sera la répartition de l’effort demandé entre réduction des dépenses et hausses d’impôts d’une part mais aussi entre ménages et entreprises, entre générations (actifs vs retraités) et entre catégories socio-professionnelles (en fonction du niveau de revenu).

 

● Le Gouvernement a donc présenté une clé de répartition 2/3 (baisse des dépenses) – 1/3 (hausses d’impôts). Mais cette présentation révèle une faille, relayée par Le Monde, avec une proportion inversée, étant donné que Bercy comptabilise dans la partie économies, les baisses de dépenses fiscales. En langage budgétaire, une dépense fiscale est une réduction d’impôt. Raboter ces réductions revient en définitive à augmenter indirectement les impôts.

 

● Si l’on veut prendre en compte l’effort réel demandé aux entreprises, il convient de comptabiliser à la fois les hausses d’impôts les concernant, le rabotage de leurs allègements et la réduction des aides publiques (subventions, primes versées dans le cadre de dispositifs ad hoc), ce qui représente le tiers de l’effort total (au lieu du chiffre de 22% avancé par le Gouvernement), pénalise aussi les PME (augmentation du coût du travail, baisse des aides à l’apprentissage), sans compter les effets de bord sur les mutuelles ou les labos pharmaceutiques pour lesquels l’impact du freinage des dépenses de santé demeure encore difficile à chiffrer.

 

● Beaucoup d’observateurs considèrent que beaucoup d’économies sont insuffisamment documentées même si de nombreuses mesures d’ajustement relèveront du domaine réglementaire, conventionnel pour le secteur de la santé ou opérationnel. Le gel des crédits des ministères – déjà acté par les lettres plafonds du précédent Gouvernement – se traduira par une diminution des dépenses d’environ 15 milliards d’euros, tandis que des économies supplémentaires de 5 milliards leur seront demandées, avec des baisses d’effectifs à la clé. Tous les ministères seront concernés, y compris la Défense, la Justice ou la Recherche, pourtant couverts par des lois de programmation. Les opérateurs de l’État devront aussi réduire leurs dépenses d’1,5 milliard d’euros en 2025.

 

● Le Premier ministre, même s’il travaille depuis des semaines à l’hypothèse d’un 49-3, a annoncé, d’une part, déclencher la procédure après le débat parlementaire tout en tenant davantage compte des amendements issus des groupes politiques pour limiter les tensions internes au sein de son Gouvernement de coalition tout en isolant le NFP qui échouerait une nouvelle fois à le censurer. D’où l’idée que le budget présenté par le Gouvernement est « perfectible » selon les propres mots de Michel Barnier. Ces amendements parlementaires disposeraient d’une marge de manœuvre de 0,2 point de PIB pour baisser et/ou verdir les dépenses* afin d’améliorer le solde budgétaire.

 

*Environ 7 milliards d’euros relevant des débats parlementaires

11/10/24